Une formation documentaire en mode « classe inversée » grâce à LibGuides

On entend beaucoup dire que la diversification des méthodes pédagogiques par les enseignants et formateurs est gage d’un meilleur apprentissage chez les étudiants. Dans plusieurs contextes, l’exposé magistral traditionnel ne convient plus et il faut ainsi tenter de trouver des manières d’enseigner plus efficaces et plus interactives. Il peut par contre être difficile pour un formateur ponctuel (ne rencontrant les étudiants qu’une fois durant le semestre), d’appliquer les innovations du monde de l’éducation.

Le principe de classe inversée n’existe que depuis le début des années 2000 (Lage, Platt & Teglia, 2000). Cette innovation pédagogique récente demande à l’étudiant d’introduire et de se former à certains concepts sur son temps personnel, avant le cours. Cela peut prendre différentes formes (vidéos, lectures, contenu audio) et ce contenu peut être écouté, regardé ou lu au moment opportun pour l’étudiant. L’objectif est de minimiser le temps où le professeur introduit un concept en classe pour ainsi permettre aux étudiants des moments plus « actifs » en classe où des expériences, des laboratoires, des discussions, et d’autres types d’activités peuvent avoir lieu (Milman, 2012). Dans la méthode traditionnelle, la période « active » (exercices, etc.) se fait en dehors des heures de cours, alors que la période « passive » se fait en classe avec le professeur. Or, on considère en classe inversée, que la présence du professeur est beaucoup plus pertinente lors de la phase « active » d’apprentissage. L’idée est donc d’inverser les deux phases, afin que l’étudiant puisse avoir accès au professeur (ou à ses camarades de classe) lors de sa phase active (exercices, etc.)

Pour les bibliothécaires et techniciens formateurs, il peut être plus ardu d’utiliser la classe inversée puisqu’il faut avoir une bonne communication avec le professeur si on veut qu’il impose à ses étudiants de faire du travail en amont, soit à la maison ou avant la formation documentaire. De plus, cette documentation demande un certain temps de préparation, surtout lorsque l’on a à couvrir plusieurs sujets à la demande des professeurs. En quoi la classe inversée pourrait donc être une méthode pédagogique efficace pour l’atteinte des objectifs d’apprentissage par les étudiants?

Le cas d’une formation à la maîtrise en sciences cliniques et biomédicales

Dans le cadre d’une formation à la maîtrise en sciences cliniques et biomédicales, je devais aller rencontrer six étudiants pour leur offrir une formation sur (préparez-vous) :

  • le plan de concepts
  • les bases de données (sujets divers = bases de données diverses)
  • les thésaurus
  • EndNote (fonctionnalités avancées)
  • les facteurs d’impact et le H-index
  • l’analyse de citations
  • le processus de publication dans une revue scientifique
  • le libre-accès (ce que c’est + la recherche de document)

Les attentes du professeur étaient que les étudiants comprennent ces notions à la sortie d’un cours de trois heures.

Pour plusieurs des notions que le professeur souhaitait que les étudiants comprennent, il était difficile de leur faire faire des lectures ou de leur faire voir une vidéo antérieurement à la formation. Pour la plupart, j’avais l’impression que c’est en faisant les manipulations que l’apprentissage était le mieux intégré. Alors peut-être que ces concepts n’ont pas besoin d’être enseignés magistralement?

LibGuides à la rescousse

J’ai donc commencé à monter un guide (Libguides©) dans lequel j’ai tenté de séparer les concepts à enseigner en différentes étapes. J’ai pris comme fil conducteur les étapes d’une recherche, de son commencement jusqu’à sa publication. Comme les étudiants sont à la maîtrise, c’est un processus à lequel il est possible qu’ils prennent part.

Le guide est donc l’essentiel du cours. Les étudiants sont appelés à effectuer une série de manipulations, d’exercices, d’étapes où les concepts à apprendre et à connaître sont intégrés. Rien à faire en amont pour eux, leurs connaissances de base sont suffisantes. Comme le groupe est composé d’étudiants de maîtrise, je me suis permis de tenter l’expérience.

Au début du cours, j’ai expliqué aux étudiants le déroulement : chaque étape a une durée plus ou moins déterminée (environ 20-25 minutes par étape). Lorsque des manipulations précises sont à faire, elles sont bien indiquées. Pendant l’étape, les étudiants peuvent poser des questions, comme ils sont peu nombreux, ce n’est pas un problème. À la fin de l’étape (quand tous ont terminé ou que le temps est écoulé), on revient en groupe voir ce qui a été difficile/facile. Si besoin est, une démonstration est faite à l’avant pour que tous soient à la même page. Dans certains cas, notamment avec des fonctionnalités avancées d’EndNote, plusieurs moyens peuvent être utilisés pour réussir les exercices, je suis intervenue en grand groupe pour mentionner les méthodes les plus efficaces. Des discussions ont aussi eu lieu, notamment lors de la dernière section concernant le libre-accès.

Des résultats appréciés et positifs

Les étudiants ont semblé apprécier l’expérience et j’ai eu un excellent retour du professeur qui trouvait l’idée d’une classe inversée en direct très intéressante lorsqu’on a beaucoup d’éléments à passer dans un cours.

Toute la matière demandée par le professeur a été vue, rapidement, certes, mais si les étudiants voulaient en savoir plus sur un concept ou revoir certaines manipulations, une boîte contenant des éléments de réponses a été ajoutée sur la page du guide (Libguides©) pour chacune des étapes quelques jours après le cours.  Par exemple, pour la section portant sur quelques fonctionnalités avancées d’EndNote, des liens vers carrefour gestion bibliographique et des vidéos Youtube sur les manipulations à effectuées pour remplir certaines tâches ont été ajoutés sur la page à la suite du cours. En regardant les statistiques du guide, j’ai pu constater que les étudiants sont revenus le consulter durant le trimestre.

Il est certain que de monter un tel cours sous forme d’exercices peut paraître ardu. Selon moi, monter un cours sans cela peut l’être tout autant. C’est en classe qu’on voit la différence. Les étudiants sont actifs, s’entraident, tentent d’être les premiers à compléter l’étape, écoutent lors des explications, etc. Je dirais même plus, certains questionnements d’étudiants à la suite d’une étape ont été répondus par les autres étudiants qui eux connaissaient la réponse. Les discussions entre le formateur et les étudiants c’est bien, mais quand ils peuvent apprendre les uns des autres, c’est autrement plus intéressant. La formule permet aussi d’évaluer la compréhension des étudiants et de répéter les éléments importants à plusieurs moments durant la formation et non uniquement à la toute fin.

En résumé, je ne sais pas si le terme « classe inversée en direct » est le bon, mais je peux dire cette expérience a été bénéfique autant pour les étudiants et le professeur que pour moi-même. Je compte réutiliser ce modèle de cours pour des formations futures lorsque les sujets s’y prêteront. Je crois donc que les objectifs d’apprentissage ont été atteints par les étudiants

Pour les personnes intéressées, n’hésitez pas à consulter le guide créé pour cette formation (guide présentement en mode « corrigé ») :

http://libguides.uqac.ca/mscb

Références

Lage, M., Platt, G., & Treglia, M. (2000). Inverting the Classroom: A Gateway to Creating an Inclusive Learning Environment. The Journal of Economic Education, 31(1), 30-43. doi:10.2307/1183338

Milman, N. B. (2012). The flipped classroom strategy: What is it and how can it best be used?. Distance Learning, 9(3), 85.

À propos de janiegaubou

Bibliothécaire au Département des sciences de la santé Université du Québec à Chicoutimi

Rétroliens/Pings

  1. Expérience de formation en « classe inversée » par une bibliothécaire - 11 Mai 2018

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